samedi 5 juillet 2008

Le final du périple 2008 : La course des crêtes d'Espelette - Trail


05 juillet 2008

Départ à 15 h 30

Distance : 27 Kilomètres

Dénivelé positif 1200 m


Espelette, le 5 juillet 2008,18 h 22

Ça y est, cette fois ci, c’est bien fini pour ce périple 2008, je passe sous l'arche d'arrivée et attend qu'un commissaire flashe le code barre de mon dossard pour enregistrer mon temps.

Ma diagonale du flou se termine donc par un chrono précis : 2 h 52 et 4 secondes.

Ce n’est pas une performance, loin de là ! Le 1er est arrivé depuis 1 heure, mais je suis content de moi. J’ai eu de très bonnes sensations, même si la fin a été massacreuse pour mes jambes. Le vélo est bien complémentaire à la course à pied.

En recherchant les copains dans la foule et en en attendant Florence, déjà dans ma tête se dessinent d’autres projets de trail, de raids et de triathlons qui me paraissent désormais plus accessibles, la préparation vélo remplaçant une grosse partie de la préparation course à pied habituellement très éprouvante pour mes articulations fragiles. Pourquoi pas à nouveau un marathon en essayant d'améliorer mes 3 h 27 de Paris. J'envie Christian , Thierry, Eric, Didier, Maryse, Stéphane Jacky et toutes celles et tous ceux qui vont cet été aller se frotter au petit ou grand mythique UTMB (tour du Mont Blanc).
Doucement François, après les grosses cuisses, voila la grosse tête qui Te prend !

Pour l’instant, je savoure ce final et me décide enfin à regarder dernière moi par-dessus mon épaule, pour voir le chemin parcouru depuis Iteuil et revivre sur le blog ce périple au petit goût d’aventure.
Cette diagonale m’a non seulement permis de vivre de superbes moments en passant dans tous ces magnifiques départements, de raffermir des liens d’amitié, mais aussi de gravir sans complexe la courbe du dénivelé des années et de passer la cinquantaine, non pas sur une courbe descendante mais plutôt ascendante. (pourvu que ça dure)

Ce blog a aussi été l’occasion pour moi, taiseux de nature et cycliste dilettante, de tenter de formuler, d’exprimer et de fixer par écrit les sensations et impressions éphémères que j’ai vécues au fil des jours pour essayer de les faire partager.
Solitaire physiquement sur le vélo, mais en lien permanent avec toutes celles et ceux qui me suivaient et m'encourageaient au travers de ce blog en forme de clin d'oeil à Christian, Thierry et Dominique qui sont allés l'an passé faire la Diagonale des fous sur l'île de la réunion.

- Une météo favorable,
- un parcours via michelin « option vélo » avec des passages extra ordinaires (même si je râlais après quand je m’égarais),
- une fin de mois de juin parfaite avec de très longues journées,
- une nature verdoyante et fleurie après une fin de printemps pluvieuse,
- un vélo en cadeau pour mes 50 ans et une mécanique sans grosses défaillances, (une petite remise en état s'impose un peu)
- une famille, des filles, des amis et des copains qui m’ont soutenu et encouragé
- et surtout, ma chère et tendre, Florence, conciliante qui a su me laisser aller au bout de ce projet, malgré ses appréhensions et a pris en charge pendant 15 jours la gestion matérielle de la maison.

Voilà tous les ingrédients qui m'ont permis de réaliser dans les meilleures conditions MA DIAGONALE DU FLOU 2008.

Au total, 1 670 km, pour 17 632 mètres de dénivelé positif, 17 748 mètres de dénivelé négatif en 112 heures de pédalage, soit 500 000 tours de manivelles, d'Iteuil à Carnac fin mai 2008 puis d'Iteuil à Espelette via Carpentras fin juin 2008

Merci 500 mille fois à toutes et à tous pour ce rêve devenu réalité.
La nuit pour m'endormir, fini de compter les moutons, je compterai dorénavant les tours de manivelles.

Je continuerai bien entendu cet été à boucler mes visites à vélo à toutes celles et tous ceux qui ont participé à mon cadeau, de Poitiers Au Mans, Nouâtre, Chinon, Montlouis, Bordeaux, Saintes, La Palmyre etc..

Encore quelques coups de pédales en perspective avant le 29 octobre 2008.

Biz'a l'oeil et à très bientôt.
François

Accès aux photos classées par ordre chronologique en cliquant sur le lien suivant : Ma diagonale du flou passe par Iteuil
14 départements traversés : Vienne, Haute Vienne, Corrèze, Cantal, Lozère, Haute Loire, Ardèche, Gard, Vaucluse, Hérault, Aude, Haute Garonne, Gers, Pyrénées atlantiques.






Récit de ce final pédestre :

Espelette, le 5 juillet 2008, en début d'après midi.

4 846 trailers, coureurs et marcheurs se préparent dans les rues de la petite ville sous un ciel très bas et chargé de nuages. Ils sont là pour la course des cretes.

La pluie qui a commencé à tomber dans la nuit ne s'est guère arrêtée depuis : crachin et averses en discontinu avec quelques accalmies de très courte durée.

Le matin même, à l'abri sous notre tente au milieu d'un sol détrempé et boueux, le moral était au plus bas pour certains dans notre petite troupe.

Pour ma part, j'envisageais même un instant la déroute et me demandais si j'allais prendre le départ du trail de la course des crètes.
Seul, j'aurai sûrement plié la tente et déclaré forfait.

Heureusement, l'émulation du groupe des copains du Pec, les encouragements de Florence et des copains ont vite chassé ces pensées défaitistes et rallumé tout au fond de moi, le fol espoir de terminer ma diagonale en beauté.

En effet, musculairement, je commençais à être mieux, et j'avais maintenant envie de tester les prédictions de Joël, Daniel et Lulu qui m'assuraient que mes 1 300 km de vélo me seraient bénéfiques pour le trail d'espelette.

Espelette, centre ville, 15 h 25.

je suis dans la masse des traileurs sur la ligne de départ, le crachin recommence à tomber, les montagnes sont dans les nuages. En arrivant tout à l'heure en ville avec Olivier, Carole et Florence, j'ai pris un doliprane 500mg qu'une dame à sa fenêtre m'a gentiment donné quand je lui ai demandé.

La pression monte, la chaleur humaine rend l'atmosphère moite et un peu étouffante, comme à tous les départs de course, où tous les coureurs sont serrés les uns contre les autres, vérifiant les lacets, le chrono où plaisantant avec les voisins pour décompresser.

Espelette, centre ville, 15 h 30.

C'est le top départ, je me relâche, je vois Dominique à ma gauche qui accompagnera jusqu'à la fin Florence et Carole, tel le saint Bernard en promenade dans le pays basque.
Plus loin en passant devant notre camping, je rattrape David qui coach Mehrad.
Je me sens bien mais suis méfiant. En course tout va bien et 15 secondes plus tard tout peut aller mal.

Un couple sur le bord de la route, lui, lui présentant un caillou ou une pièce pour qu'elle le prenne dans la main et se concentre dessus pour oublier sa fatigue. Elle geignant timidement. Quel charlatan, son remède de perlimpinpin, elle n'y croit pas et elle a raison. Au bout de 2 km, alors qu'on n'a pas encore attaqué les difficultés, c'est vraiment la prendre pour une imbécile que de lui faire croire qu'un caillou dans la main peut faire gravir les montagnes.

Jacky me rattrape, on papotte et je lui dis que j'y vais tranquille, mon cardio étant à 154, je ne veux pas aller trop vite avant la longue montée vers le Montdarrain.

1er ravito, je passe.

Petit à petit, mon rythme s'impose de lui-même, j'ai mis le bon braquet, le souffle est régulier et facile, les jambes sont alertes, le plaisir de courir est revenu et moi je n'en reviens pas.

Alors que j'attaque le sentier raviné, Lulu et Annie sont là pour nous encourager. Lulu me lance une vanne pour me détendre et m'encourager : photo. En passant, je leur laisse ma paire de lunettes.

Je n'insiste pas quand la pente est trop raide, je marche et économise mes forces. je grimpe toujours sans fatigue apparente.
Je suis bien, même pas mal aux jambes, je gère.
Un coureur de Vienne Biathlon me double en slalomant entre les coureurs dans ce sentier étroit.
Surtout ne pas s'emballer, ne pas l'accrocher, rester humble avec la montagne, ne pas se laisser entraîner dans ce genre d'efforts inutiles et contre-productifs.

Ne pas se laisser non plus ralentir par des faux rythmes et ralentissements que cette longue guirlande humaine multicolore qui grimpe devant moi provoque par moment.
Arrivé presque en haut du Pic du Montdarrain, c'est à mon tour de doubler le Poitevin sans un regard ni me retourner je passe et continue. Je me sens à l'aise. Je savoure en mon fort intérieur. Le virus de la compète reprend le dessus, c'est ma fierté qui est en jeu. je passe le braquet au dessus et enchaîne sans défaillir.
Juste une petite gorgée d'eau en passant au ravito. En haut après les rochers escaladés, on est dans le crachin et les nuages. Le maillot trempé par la sueur et le crachin me colle à la poitrine et au ventre, glacial !
Courir, ne pas s'arrêter, regarder où je mets les pieds, ne pas hésiter sur la trajectoire, la calculer à l'économe mais sans prendre trop de risques.

Je dévale maintenant dans l'herbe et les cailloux. Dommage que la vue soit bouchée par les nuages, mais de toutes les façons, il faut rester concentré en permanence sur chaque pas pour ne pas glisser, rester vigilant et souple sur les jambes, anticiper, doubler, ne pas perdre l'équilibre, respirer, souffler,laisser un espace de 2 ou 3 m avec celui qui est devant, le regard à l'affût des trous, cailloux, parties glissantes etc...

Séparation des parcours avec d'un côté le 27 km et de l'autre le 19 km que doit emprunter Olivier qui court aujourd'hui son premier trail.

Le sentier sillonne dans les fougères, des pottocks apparaissent de temps en temps sortant du brouillard. Des commissaires de courses sont à cheval.

Après quelques bosses et 4 ou 5 km de petit sentier on remonte sur la montagne pour aller rejoindre à nouveau le parcours du 19 km.

Les montées et les descentes se succèdent et je me sens toujours bien, ravito après ravito, je prends une seule petite gorgée au passage, pour ne pas me charger l'estomac et me gêner la respiration.
L'animation par les fanfares et les groupes est vraiment réconfortante, je les applaudis à chaque fois pour les remercier.

Une longue remontée sur un chemin pierreux. Suit une descente qui tape et résonne dans mes jambes. Elle est là pour me rappeler à l’ordre et me forcer à ralentir un peu afin de ne pas attraper « les grosses cuisses ». Je pense à Florence qui a pris ce départ sans être assez reposée, elle doit en baver comme dirait Lulu.

Longue descente technique jusqu’au fourgon de la croix rouge noyé et caché dans le brouillard puis c’est la descente infernale vers Espelette.
Les muscles des jambes commencent à me faire souffrir sérieusement, mais il faut tenir jusqu’au bout et ne pas relâcher l’effort. Il faut se forcer à lever les jambes pour avancer plus vite. Une enjambée en vaut bien une et demie et pourtant, je me fais doubler par 2 gazelles très souples et relâchées que chaque impact sur le sol n’a pas l’air d’affecter. "Où sont passées les gazelles ?" Je ne sais pas. Elles ont disparues devant moi.

Plus que 6 km.
Une route goudronnée maintenant est sans pitié pour mes cuisses, je dois me forcer à garder ma foulée et ne pas penser à la douleur qui me déchire les jambes.

Restent 5 km, tous les parcours se sont maintenant rejoins depuis un moment sur ces derniers kilomètres et c’est difficile de trouver des repères sur d’autres coureurs pour savoir si je me traîne où si je garde bien mon rythme. Je double marcheurs et coureurs.
Je salue Serge au passage qui descend à fond avec ses bâtons vers Espelette pour ses 13 km de marche nordique. Il me conseille de changer de braquet…. il est joueur .

Mais c'est vrai que je nes suis pas sur le vélo, où il est toujours possible de trouver un petit répit pour récupérer ne serait-ce que 15 secondes. Là, il n’y a pas d’échappatoire il faut donner, et j’ai bien l’intention de tout donner avec générosité comme toujours quand je participe et m’engage sur une course au prix de lendemains très difficiles. Je sais que ce sera le prix à payer si je veux essayer de me surpasser.

Restent 2 km, et c'est un énorme point de côté qui m’oblige à ralentir et à souffler à fond pour le faire passer. Petite frayeur, côté gauche, côté du coeur.... Le cardio n'est plus sur ma poitrine, c'est malin, je l'ai descendu à ma ceinture pour qu'il ne me gène pas. Je me tâte, m'ausculte en continuant à courir pour profiter de l'élan de la descente. J'ai rarement des points de côté, je devais être en sur-régime. Le moteur a du s'emballer dans la descente.

Une petite côte est la bienvenue et me permet de me rassurer et faire complètement disparaître ce point de côté, on entend le commentateur sur la ligne d’arrivée.

1 km de l'arrivée, toujours maintenir l’effort, ne pas se relâcher.

Passage sur la passerelle glissante. Je coupe à la corde pour doubler, je sais que la côte finale m’attend et qu’elle va être impitoyable.

Lulu et Annie qui m'encouragent ! je me redresse (ou plutôt, j’en ai l’impression), je lève les genoux je tire sur les bras.

Photo

Allez encore 400 m, l’équivalent d’un tour de piste, il faut essayer d’accélérer et de finir avec panache.

200 m J’entends Maryvonne qui crie « allez François », c’est le signal dans ma tête, je trouve les ressources pour sprinter jusqu’à l’arrivée.

Temps : 2 h 52 m 4 s
Classement : 373 eme sur 821
Classement par catégorie : 65eme sur 170

Je suis dans la première moitié du classement, l'honneur est sauf !